La communication entre les cellules et avec l’environnement extérieur se fait généralement par l’intermédiaire de petites molécules qui se fixe sur protéines appelées récepteurs et permettent la transmission du signal nécessaire a une réponse cellulaire adapté. Dans le système nerveux des mammifères, le L-glutamate est le principal neurotransmetteur excitateur et joue un rôle clé dans la transmission de l’information, dans la plasticité synaptique et dans les processus physiologiques tels que l’apprentissage et la mémoire. Les aberrations de la transmission glutamatergique sont à l’origine de nombreux troubles neurologiques, ce qui confère à ces récepteurs un intérêt thérapeutique.
Parmi les récepteurs liant le L-glutamate dans le cerveau, les récepteurs métabotropiques du glutamate (mGlu) appartiennent à la famille des récepteurs couplés à la protéine G (RCPG). La famille mGlu est composée de huit sous-types, divisés en trois groupes sur la base de leur pharmacologie, de leur similarité de séquence et de leurs voies de signalisation cellulaire. L’architecture du récepteur mGlu comprend un domaine extracellulaire Venus-Fly Trap (VFT) connecté au domaine transmembranaire (7TM) par l’intermédiaire d’un domaine riche en cystéine (CRD). La liaison du L-glutamate dans le domaine VFT et le changement de conformation qui s’ensuit entraînent la transmission du signal au domaine 7TM, qui en interagissant via l’hélice transmembranaire 6, stabilise une conformation dite active, qui induit la liaison et l’activation de la protéine G.
Outre le glutamate, qui est l’agoniste orthostérique, les récepteurs mGlu peuvent être modulés de manière allostérique par des molécules appelées modulateurs allostériques négatifs ou positifs (NAM et PAM). Le récepteur de sous-type 5, mGlu5, est un acteur important de la plasticité synaptique qui joue un grand rôle dans les processus d’apprentissage et de mémorisation. Son dysfonctionnement est associé à plusieurs troubles neurologiques, tels que les maladies de Parkinson et d’Alzheimer, ce qui fait du récepteur mGlu5 une cible médicamenteuse d’intérêt. Plus précisément, sa modulation allostérique positive présente un potentiel thérapeutique pour soulager différents symptômes de la schizophrénie. Cependant, le développement de PAM spécifiques d’une isoformes de mGlu est un réel challenge. A ce jour, peu d’informations sont disponibles sur le mode d’action des PAMs sur la transmission de l’information associée au récepteur mGlu5.
L’équipe « Mécanismes moléculaires et structuraux de la neuromodulation » animée par Guillaume Lebon et Cyril Goudet présente ici les structures obtenues par microscopie électronique en condition cryogénique (cryoEM) du récepteur mGlu5 purifié avec trois PAMs chimiquement et pharmacologiquement distincts. Les auteurs ont constaté que les PAMs modulent l’équilibre du récepteur à travers leurs différents modes de liaison, révélant comment leurs interactions dans les 7TMs impactent le paysage conformationnel et la fonction du récepteur mGlu5. En effet, les PAMs stabilisent de manière différentielle l’interface entre les 7TM nécessaires pour que le récepteur atteigne l’état actif du récepteur (Acc), ce qui a un impact direct sur la signalisation du récepteur. De plus, l’étude identifie un état intermédiaire sans PAM mais lié à l’agoniste, qui révèle également des interactions médiées par la boucle intracellulaire 2, et qui représente un état de transition entre la conformation inactive et la conformation active. L’activation du récepteur mGlu5 est un processus en plusieurs étapes dans lequel la liaison des PAMs dans les 7TMs module l’équilibre vers l’état actif. Cette étude illustre la diversité des modes de liaison au niveau du récepteur et ouvre de nouvelles pistes pour concevoir des molécules d’intérêt thérapeutiques visant ce récepteur pour traiter les symptômes de la schizophrénie.
Cette étude vient d’être acceptée pour publication dans le journal Nature Communications.

Analyse en particules isolées et microscopie électronique en condition cryogénique du récepteur mGlu5 lié à la PAM. (A) Classification 2D du récepteur mGlu5 lié à la PAM, calculée à partir d’images à haute résolution. (B) Modèle 3D du récepteur mGlu5 lié au quisqualate et à la PAM VU0424465, montrant une molécule liée à chaque 7TM. L’encart montre la vue zoomée de la poche de liaison du VU0424465. (C) État inactif (Roo) avec l’antagoniste LY1341494 lié au VFT (PDB 7FD9). (D) État actif intermédiaire identifié dans cette étude, avec du quisqualate lié aux deux VFTs, mais pas de PAM lié. Les 7TMs sont éloignés l’un de l’autre comme dans l’état Roo. (E) État actif (Acc) lié à VU0424465. Pour la représentation graphique du dimère du récepteur mGlu5, les protomèrs sont colorés en vert et en bleu. Les ligands (représentés par une sphère) comprennent le LY341495 (orange), le quisqualate (vert et bleu) et le PAM VU0424465 (jaune).